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Hockey sur glace - KHL - Kontinental Hockey League
KHL : Roulette russe
 
Le Yugra Khanty-Mansiysk, club discret, au nom qui rebute les Français est une équipe avec un budget peu épais et qui depuis deux ans fait confiance uniquement à des joueurs russes
 
Média Sports Loisirs, Hockey Hebdo Philippe Rouinssard le 10/08/2016 à 08:29
Le club des Khantys et des Mansis

Le club de hockey du Yugra se situe dans le district autonome des Khantys-Mansis, deux peuples autochtones sibériens les Khantys et les Mansis. Originellement nomades, chamanes, chasseurs, guerriers et éleveurs de rennes, ils ont été, comme la plupart des peuples premiers de Russie, sédentarisés de force dans les années 1930 par la politique de collectivisation menée par l'URSS de Stalin.
En plus du Russe, les langues officielles sont encore aujourd'hui celles de ces deux peuples, le khanty et le mansi, deux dialectes ob-ougrien. Le district autonome malgré ses 530 000 km² est peu peuplé avec 2,7 millions d'habitants. Le climat y est sub-polaire avec 8 mois de très rude hiver (-20° de température moyenne et jusqu'à -40°), des étés courts et timides (20° dans les températures maximum). Malgré ces conditions très dures, la région est occupée depuis 6000 ans avant notre ère par des chasseurs de mammouths. On retrouve d'ailleurs régulièrement des squelettes de ces éléphantidés dans la région.
On a donc à faire ici à un club de hockey qui se situe dans la steppe sibérienne, au contact entre le nomadisme, le chamanisme, les grands froids sibériens, les peuples premiers et la chasse au mammouth de quoi alimenter tous les clichés et les fantasmes.
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Le Yugra fait contre mauvaise fortune bon coeur

Ce district autonome est également appelé Yugra, voila le nom du club tout trouvé. Il est basé dans la capitale fédérale, Khanty-Mansiysk, dont le nom est également formé de celui accolé des deux peuples autochtones. C'est une petite ville de 93 500 habitants selon le dernier recensement. Il s'agit pour notre vision occidentale d'un bout du monde. Khanty-Mansiysk est en effet la plus grande ville à des kilomètres à la ronde, située à 2000 km de Moscou à vol d'oiseau en plein coeur de la steppe sibérienne occidentale au bord de la rivière Irtych, prise par les glaces pendant les 2/3 de l'année.
K-M, affectueusement surnommée, est célèbre pour ses compétitions de biathlon mais aussi d'échecs. Alors pourquoi diable installer un club de hockey de calibre dans cette région lointaine ? La réponse tient en un seul mot : pétrole.


L'or noir et le hockey

Le sous sol du district autonome des Khantys-Mansis regorge littéralement de pétrole. Aujourd'hui 51% du pétrole extrait en Russie provient de ce district. Ce qui est donc une véritable manne financière pour la région. Khanty-Mansiysk profite également de cette richesse et attire des investissements étrangers. Le niveau de vie est le deuxième plus élevé du pays après Moscou. La ville se dote donc d'infrastructures des plus modernes (théâtres, musées, hôpitaux, gare, aéroport...) dont une patinoire. L'Arena Yugra d'une capacité de 5 500 places, bâtie en 2009.
Si le hockey n'est pas forcément un sport développé dans la région, force est de constater que les rivières et lacs gelés par le long hiver, ont vu jouer sur leur surface, les gamins au hockey depuis des décennies. En 2006 le club de hockey du Yugra Khanty-Mansiysk voit le jour dans ce petit coin de Sibérie, sur une volonté expresse du gouvernement local.
Le club devient vite professionnel et s'engage en Pervaya Liga pour la saison 2007, doté d'un solide financement il remporte le championnat cette année là et grimpe en Vischaya Liga (ancêtre de la VHL) le second niveau russe. Le club vert et bleu au couleur du district et arborant fièrement la fleur symbole de la région, ne vient pas faire de figuration. Après une année éblouissante il remporte le titre de seconde division. Il peut désormais évoluer dans son nouvel écrin de glace et remporte une deuxième année de suite le titre de champion de Vischaya Liga.
Khanty-Mansiysk, avec un budget uniquement financé par le district et sa patinoire aux normes KHL demande son intégration dans la grande ligue et l'obtient sans difficultés. Il fera ses débuts dans le grand bain continental en 2010.


Un parcours en dents de scie

Comme bien souvent en KHL, le club nouveau venu recrute des solides recrues pour ne pas être ridicule à son démarrage dans la cour des grands. Khanty-Mansiysk ne fait pas exception à la règle, les étrangers sont Slovaques : Zagrapan, Bulik et Dravecky. Mais le gros coup du Yugra est devant le filet, il aligne Edgars Masalskis le mur letton doublé par
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L'Arena Yugra peine toujours à remplir
Mikhaïl Biryukov l'un des gardiens les plus prometteurs du hockey russe de l'époque. La première saison se passe plutôt bien dans la conférence orientale, avec 28 victoires en 54 matchs, et une honnête cinquième place au classement. En playoffs pour sa première saison le club sibérien est plutôt bien lancé, même si le premier tour s'achève vite avec une défaite 2-4 au premier tour contre Magnitogorsk.
Après une bonne première saison, le Yugra se renforce pour sa deuxième tout en conservant une ossature similaire. Il fait encore mieux avec 29 victoires mais cette fois n'est que huitième dans la conférence orientale. Cette place peu enviable lui offre un premier tour extrêmement compliqué contre le Traktor Tchelyabinsk qui dispose de K-M en 5 matchs.
En retrait au classement malgré une progression en nombre de points, Khanty-Mansiysk ne sent pas le danger et conserve quasiment son effectif inchangé à l'aube de la saison 2012-13. Avec 26 victoires, il est cette fois trop juste en se classant neuvième et ne se qualifie pas pour les séries.
Le Yugra tente de bouleverser son effectif et change ses étrangers, se débarrasse de certains joueurs mais rien y fait. Il ne totalise que 20 victoires en 2013-14 et termine onzième à plus de dix points de la barre.
Il change de logo à l'aube de la saison 2014-2015 et arbore désormais fièrement un mammouth sur ce dernier. Les couleurs vertes et bleues et la fleur qui rappellent le district sont conservés ainsi que les caractères qui forment le mot "Yugra" qui sont les mêmes que ceux des armoiries des Khantys-Mansis. Malgré tout les difficultés continuent avec la baisse des subventions régionales. Malgré le renfort de l'éblouissant Nikita Gusev qui fait le show le Yugra réalise 21 victoires et termine douzième son plus mauvais résultat jusqu'alors.
Il se dote pour la saison dernière d'une équipe 100% russe dans le but de faire des économies. Après un début de championnat dantesque le Mammouth redresse le tir et revient à toute allure dans le classement en enfilant les victoires. Mais c'est tout de même insuffisant et le Yugra termine 11ème avec 25 victoires.


Le Mammouth privé de pétrole

Le club doit faire avec un budget plutôt réduit 500 à 700 millions de roubles (environ 10 millions d'euros) et du coup peine à attirer des bons joueurs et faire grimper ses résultats qui attireraient des sponsors et donc favoriseraient les rentrées d'argent.
Les financiers du club sont uniquement la ville de Khanty-Mansiysk et le gouvernement du district autonome. Et les revenus de ces collectivités proviennent en quasi exclusivité des ventes et de l'extraction du pétrole de la région. La chute du prix du baril et les sanctions contre la Russie ont fait plonger le revenu du district qui a donc réduit la subvention du club, qui ne peut donc pas redresser le tir. Dans un tragique mais classique cercle vicieux.
A l'intersaison 2014, le gouvernement du district s'est même demandé s'il ne fallait pas carrément arrêter tout sponsor au club et donc le liquider. Des rumeurs ont parlé de déménagement à Tyumen en fusionnant les deux budgets entre le Yugra et le Rubin Tyumen, club affilié de VHL, ce qui aurait permis de réduire la subvention gouvernementale tout en maintenant un niveau satisfaisant pour le club.
Finalement le gouverneur de la région, Natalia Komarova, devant l'ampleur du soutien populaire pour le club, maintient les aides financières tout en les réduisant tout de même un peu. De quoi être inquiet pour le club de Khanty-Mansiysk.


L'avenir : le jeu de la roulette russe

Le Yugra désormais ne mise que sur des joueurs russes pour la deuxième saison consécutive. Aucun étranger ne vient s'ajouter à l'équipe,
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Quel avenir pour Khanty-Mansiysk en KHL ?
cela permet de faire des économies mais aussi de montrer qu'on a confiance dans la formation. En effet les clubs affiliés au Yugra, le Rubin Tyumen en VHL, et en MHL (ligue junior) le Mamonty Yugry et le Tyumenskyi Legion sont plutôt efficaces. Du côté de Tyumen les équipes sont en perte de vitesse à cause du manque de moyens mais le club des Mammouths Juniors est l'une des puissances de la MHL et possède des jeunes joueurs prometteurs. Le club mise à fond sur ses jeunes joueurs formés au club. Khanty-Mansiysk se construit dans le temps long et espère que ce travail de fond sur les jeunes portera dans l'avenir. Le développement rapide d'une solide structure verticale en collaboration avec le Rubin Tyumen et le Mamonty Yugry est seule capable de sauver le club et donc le hockey dans le district autonome des Khantys-Mansis.
Le nouvel entraîneur du Yugra, Pavel Ezovskikh est l'un des moins connus du circuit KHL. Il martèle qu'il faut s'orienter vers un modèle unique favorisant les Russes et la formation interne sur la longue durée. L'inverse des succès rapides et faciles à coup de milliards du modèle libéral prôné par Saint-Pétersbourg ou le CSKA Moscou. Ce modèle et défendu et appliqué depuis des décennies par un autre club sibérien, le Metallurg Novokuznetsk, qui a réussit à faire de son équipe junior et de son centre de formation l'un des meilleurs de Russie, à l'inverse son équipe KHL reste embourbée faute de sponsors. Le Sibir Novossibirsk, autre club sibérien, développe aussi cette stratégie, mais grâce à un DG exceptionnel il parvient à se hisser dans les sommets orientaux grâce à des transferts de grande qualité sans un budget exceptionnel, comme quoi ce modèle peut fonctionner.
L'objectif sportif d'Ezovskikh reste le même, ramener Khanty-Mansiysk en playoffs et après tout est possible. Il a la pleine confiance du DG du club Evgeny Khatsei qui le soutient de son mieux, tentant de réduire les dettes du club et d'augmenter les dotations gouvernementales.
A Khanty-Mansiysk le hockey est populaire, le club Yugra est un projet sportif mais aussi social, la pratique du hockey est gratuite pour les jeunes et financée en intégralité par le gouvernement local. Le groupe de supporters "Only Yu" est fidèle et dynamique même si l'Arena Yugra peine vraiment à remplir les jours de matchs.
L'an prochain l'effectif du Yugra semble encore juste pour accrocher une place en playoffs, surtout qu'il y a un club de plus en Orient. Fokin a fait une bonne année en titulaire devant la cage, il devra en aligner une seconde mais il sera suppléé par Sharytshenkov l'un des grands espoirs du hockey russe débarqué du Dynamo. En défense Sergeï Gusev sera la tour de contrôle, secondé par Valentenko, Khlystov, Seleznyov ou Malevitch. Offensivement l'arrivée d'Igor Radulov fait de lui le meneur de jeu et est l'un des plus gros coup estival du Yugra, il pourra compter sur Bortnikov, Belyaev, Medvedev, Mayorov, Kuryanov, Panov ou Lyuduchin.
Quelques bons joueurs donc avec la possiblité de faire monter des jeunes talents, comme les jumeaux Lomakin ou le défenseur Puzatov. En KHL, miser uniquement sur des joueurs locaux ressemble tout de même au dangereux jeu de la roulette russe. Quoi qu'il en soit il faudra vite trouver l'alchimie pour espérer faire des bons résultats et donc attirer du public, ce qui permettra d'avoir plus de poids pour demander une hausse des subventions. Et pourquoi pas rêver à une nouvelle envolée des prix du brut ?
Le Yugra espère mûrir avec le temps lui qui vient seulement de souffler sa dixième bougie, il espère s'appuyer sur sa formation pour s'en sortir, même si cela peut prendre encore de longues années. En Sibérie occidentale on n'est pas pressé, on sait que l'hiver est long et rude, mais que les beaux jours finissent toujours par revenir
 

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