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Hockey sur glace - Division 1 : Neuilly/Marne (Les Bisons)
Hockey sur glace - Entretien découverte avec Frank Spinozzi, Coach de Neuilly
 
Frank Spinozzi, coach des Bisons de Neuilly a bien voulu se prêter au jeu de l'interview, à la patinoire Mériadeck de Bordeaux, quelques heures avant que son équipe affronte les Boxers en quart de finale. Il nous en a dévoilé un peu plus sur lui, son enfance et ses passions. Un homme au parler posé, enjoué et rieur, grand fan de ses enfants.
 
Bordeaux, Mériadeck, Hockey Hebdo Carine Boulet, Gwénola Maguelonne le 23/03/2015 à 09:54
HH : Bonjour M. Spinozzi. Merci de nous accorder cette interview.
Pouvez-vous nous raconter vos débuts au hockey quand vous étiez tout petit ? Comment en êtes-vous arrivé à monter sur des patins ?
Photo hockey Entretien découverte avec Frank Spinozzi, Coach de Neuilly - Division 1 : Neuilly/Marne (Les Bisons)
Site de Neuilly
 
FS : Là on recule !
Je suis né en France et mes parents, très jeunes, ont déménagé au Canada, à Toronto. J'avais 4 ou 5 ans. C'est là où j'ai appris l'anglais, comme tout le monde sait, quand on est petit, c'est plus facile d’apprendre une autre langue. Ca a pris 3 mois, puis je parlais parfaitement anglais. C'est pour ça que je n'ai aucun accent en anglais.
Vers 8 ou 9 ans, mes parents ont décidé de déménager au Québec, je regardais toujours le hockey sur glace à la télévision, les Maple Leafs de Toronto. Alors la première journée quand je suis arrivé là-bas, je voulais jouer au hockey. En jouant, j’ai vu que j'avais un intérêt très avancé pour ce sport. Puis, j'ai fait tous les échelons pour être au plus haut niveau.
Ce qui est incroyable, c'est que notre ville s'appelait Granby, et l’équipe Junior Majeur (l'équipe junior ici) c'était les Bisons de Granby. Et je coache en France les Bisons de Neuilly. Comme on dit, « il n'y a rien qui arrive pour rien dans la vie. Les astres s’alignent.». Mon âme était vendue à cette équipe-là.
Puis, j'ai eu une progression tout à fait normale chez nous. Moi, j'ai pris une tangente un petit peu plus académique, pour mes parents c'était extrêmement important.
Il y avait 2 ligues quand on commençait à monter : le Junior Majeur que tout le monde connaît mais il y avait aussi, dans notre temps, le Collégial AAA, qui était de même niveau mais les joueurs étaient un peu plus vieux. Souvent, ils finissaient Junior Majeur s’ils n'avaient pas fait la Ligue Nationale de Hockey et ils retournaient dans cette ligue-là. Les règlements faisaient en sorte qu'il y ait au moins 3 joueurs de 17 ans mais, par contre, il fallait être bon à l'école pour pouvoir jouer dans cette ligue. J'ai pris cette tangente-là et mon coach, quand je suis arrivé là-bas, était Clément Jodoin, qui a coaché les Penguins de Pittsburgh, qui coache les Canadiens de Montréal. Ca fait que mon intérêt a vraiment commencé comme ça.
 
 
HH : Qu'est-ce qui vous plaisait dans le hockey et qu'est-ce qui vous plaît toujours ?
 
Alors je vais vous surprendre. Mon sport favori, c'est le football américain. J'ai un amour pour ce sport parce que c'est discipliné, structuré et extrêmement gentleman. Il y a beaucoup de respect entre les athlètes, beaucoup de respect entre les coachs, les joueurs. On dit souvent que c'est une école de la vie. Je pense que le hockey est l'un des sports qui s'y rattache le plus.
J'ai une corpulence qui aime les sports d'hiver, je pense que c'est ça qui a fait que j'aime le hockey, et puis j'ai progressé là-dedans, je gagne ma vie là-dedans.
Je pense que la vitesse, l'adrénaline, comment un match peut changer du tout au tout en très peu de temps.
J'ai joué au foot longtemps au Canada, quand c'est 1-0 ça pouvait rester longtemps à 1-0. Au hockey sur glace, les chances de rester à 1-0 ne sont pas très élevées. Tu peux faire ce que tu veux mais, techniquement, ça peut finir par te battre. Et puis c'est l'un des rares sports où tu as un outil sous tes pieds, que sont les patins, donc tu quadruples la vitesse de mouvements. C'est un des derniers sports où tu as encore un peu d'improvisation sur la glace, donc l'élément technique est vraiment important. Tous les autres sports et le football américain que j'adore, tout est très cadré. Alors je trouve que le hockey est un sport qui laisse encore une chance à l'imagination, au niveau de la création offensif.
Excuse-moi pour la réponse longue et large !
 
 
HH : A quel poste avez-vous joué ?
 
J'étais défenseur. C'est pour ça que je suis toujours aussi exigeant envers mes propres défenseurs. Mon fils joue à la défense.
C'est un poste que j'aime bien car tu arrêtes toutes les attaques de l'autre équipe, et en même temps tu commences toutes les actions de ton équipe. Je trouve que c'est un poste clé.
Dans notre génération, souvent les moins bons patineurs étaient à la défense mais, aujourd'hui, souvent c'est les meilleurs patineurs. C'est tellement exigeant au niveau de ce qu'il faut accomplir sur la glace.
 
 
HH : Vos parents étaient Français ?
 
Ma mère est née à Milan et mon père à Vasto, directement sur l'Adriatique. Par leur métier, ils ont dû déménager en France pour 2 ou 3 ans. Et c'est là que Franky est venu au monde, à Bourgoin-Jallieu.
 
 
HH : Connaissaient-ils déjà le hockey ? Vous ont-ils soutenu ?
 
Ils ne connaissaient pas.
Il y a 40 ans, "soutenir" était un mot très différent d'aujourd'hui. Aujourd'hui "soutenir nos enfants" cela veut dire participer pleinement, s'assurer financièrement d'être pauvre pour que eux aient tout ce qu'ils veulent.
Dans notre temps, soutenir c’était qu'ils nous laissaient pratiquer un sport mais il fallait quand même travailler. Je ris quand je dis ça, car je trouve que c'est 2 générations aux méthodes totalement différentes. Mais ils venaient aux matchs, ils m’encourageaient.
La patinoire s'appelait « le Palais des Sports ». Tu sais, quand tu as 7 ans, 8 ans, ça donne une connotation, hein ! En plus, j'étais au Canada « Palais des Sports », fallait que j'aille là, j'ai vu le hockey, je suis tombé en amour.
 
Photo hockey Entretien découverte avec Frank Spinozzi, Coach de Neuilly - Division 1 : Neuilly/Marne (Les Bisons)
 
HH : Conseilleriez-vous le hockey à des jeunes filles ou jeunes garçons ?
 
Je suis très mal placé, j'ai 3 filles. Les 3 ont joué au hockey au plus haut niveau.
Ma plus jeune est en train de signer un Scolarship (bourse d’étude) avec une université américaine, elle est gardien de but. Donc je suis très mal placé pour ne pas encourager le hockey féminin.
J'ai coaché le Majeur AAA qui est le plus haut niveau féminin au Canada, pendant 2 saisons, dans l'Ouest Canadien. Elles jouaient 80 matchs par année. J'ai beaucoup d'amies qui sont avec l'équipe féminine du Canada. Et puis, cette année-là, j'avais 3 Slovaques qui jouaient pour moi, et les 3 ont joué dans les 2 derniers Olympiques, dont une qui est la capitaine. Voilà pourquoi j'ai un peu d'attrait pour la Slovaquie et ces pays-là car elles venaient me parler de leur pays tout le temps.
Donc j'encourage le sport, le hockey féminin. Ca a beaucoup progressé chez nous. Ici, c'est plus compliqué. Je ne suis pas convaincu qu'il va y avoir le même développement, la même quantité de joueuses.
A Kingstone où j'habite, en Ontario, juste la ville, on est à peu près 115 000 en population et on a 4 600 joueuses de hockey. Ça c'est juste les filles. Mais le hockey féminin a beaucoup progressé depuis 10, 15 ans. Il y a un acharnement des parents à les mener dans ce sport-là.
Je pense aussi qu'il y a beaucoup de filles qui s'ennuient au patinage artistique. Celles qui n'avaient pas l'allégresse ou le côté ballerine, je trouve que c'est un bon compromis. Je ne dénigre pas le patinage artistique, j'adore ce sport.
 
 
HH : Pensez-vous que la perception et l'évolution du hockey féminin en France sera la même d'ici 15 ans que celle du Canada ?
 
Non. Non. Non.Tu sais, c'est une génération complète. Il faudrait être dans les écoles, en maternelles, et leur expliquer ce qu'est le hockey sur glace. C'est la seule place où tu peux « attaquer » pour faire grandir ça. Si dans toutes les écoles, on les faisait jouer 4 fois par année du hockey sur glace à des gamines qui ont 4, 5 ou 6 ans, là, on le développerait. Parce que même s'il y en avait juste une par classe, ça en ferait beaucoup.
Je dis non, car je ne veux pas donner n'importe quelle réponse, comme tout le monde qui veut être politiquement correct. Je trouve que ce n'est pas correct car ça ne fait pas avancer nos choses.
L'histoire d'aller chercher des filles d'un peu partout pour monter une équipe, pour gagner un championnat, je ne crois pas à ça. Alors, Neuilly, Cergy, ils font tous ça au niveau féminin. Tu développes tes filles et tu gagnes avec ce que tu as. C'est ça qui crée un sentiment d'appartenance, et c'est ça qui va amener d'autre filles.
La mentalité actuelle n'est pas adéquate pour permettre à ce développement-là. Quand je dis ça, c'est autant pour les garçons que pour les filles.
On vend mal ce sport. Je dis souvent avec mes amis au Canada que la France est tellement un beau pays, mais ils disent qu'il n'y a pas plus critiques envers la France que les Français. Ils pensent tout le temps à se critiquer alors que nous, les Canadiens, tu nous entendras très rarement dire du mal de notre pays. On dit toujours du bien de notre pays, on en est fier. Et je pense que le hockey est un peu le reflet de ça. Je trouve que le hockey français est incroyable dans son niveau. Mais on ne le vend pas, on n'en parle pas en bien. Par contre, lorsqu'il y a une polémique, là on va en parler, on va mettre l'effort sur le négatif. Mais on ne va pas parler du gamin qui vient de Bordeaux, qui a grandi à l'intérieur du club, qui joue pour Bordeaux avec une équipe qui est incroyable cette année.
Je trouve qu'il faut faire plus d'effort. On dirait qu'il faut toujours attendre un drame pour parler d'une activité, j'ai de la misère avec ça. Ce n'est pas une critique que je dis envers les Français, autrement je ne serais pas ici. Si je suis ici, c'est parce que j'aime être ici. J'aime comment les gens sont. Je trouve qu'on pourrait un petit peu s'améliorer pour mieux vendre notre sport. Le hockey féminin pourrait en profiter à ce moment-là.
 
 
HH : En France, un jeune découvre parfois le hockey assez tard, 10 ou 12 ans, et il est confronté à un refus d'inscription pour pratiquer ce sport car trop âgé ! Pensez-vous que ce soit aider la popularité de ce sport en France que de freiner la pratique ?
 
Ce n'est pas juste parce qu'il est trop vieux. On va dire les vraies choses.
C'est parce que, comme il va être de niveau très faible, et que tout le monde veut juste gagner et non se développer, ils ne le prendront pas car ça va affaiblir l'équipe. Ça c'est complètement différent et c'est là que moi j'ai un problème.
Le but, ce n'est pas de gagner mais d'avoir un maximum de personnes qui font de l'activité physique à bas âge pour pas qu'ils soient comme moi... !  ça c'est la réalité. Je trouve ça important. Il faudrait enlever le mot "victoire". Et quelqu'un qui s'intéresse qu'à 9 ou 10 ans, il ne faudrait pas le juger sur son âge et les conséquences qu'on va perdre ! On le voit même dans notre club. Je trouve ça vraiment plat pour ça. A la défense pour le système d'ici, c'est que, vu qu'ils n'ont pas beaucoup de niveau, tout le monde est mélangé. Mais ce que les gens ne comprennent pas, c'est que, dans l'Ouest canadien qui est le plus grand bastion au nombre de population qui fournit des joueurs pour la Ligue Nationale de Hockey, tout le monde joue avec tout le monde, il n'y a pas de niveau jusqu'à 15 ans.
Par exemple, j'avais ma fille qui jouait avec mon garçon, même si mon garçon jouait à un excellent niveau, ma fille jouait à un excellent niveau en féminine, mais ils ont joué toute leur jeunesse ensemble. Ca ne les a pas empêchés de progresser. Et elle jouait dans le jeu en plus, et quand elle a changé, elle est devenue gardien mais elle est restée à jouer avec mon fils. Je trouve que c'est sain.
 
 
HH : Est-ce qu'il y a un joueur ou un coach qui a été votre modèle ou auquel vous vous êtes identifié ?
 
Comme coach, c'est Clément Jodoin. Aussi peu que je l'ai eu, son influence, son respect du jeu et de l'athlète et son dévouement envers le hockey ont vraiment été une inspiration pour moi.
Et comme joueur, eh bien.... je suis un vieux de la vieille, alors ils sont tous à la retraite ceux que j'ai aimés. Ce sont des joueurs comme Raymond Bourque. J'ai été au Québec longtemps, alors Guy Lafleur était notre héros à tous. Wayne Gretzky, c'était incroyable. Il y en a plusieurs. Il y avait aussi un Suédois qui s'appelait Börje Salming, il était incroyable, il jouait à Toronto quand je suis arrivé au Canada. Lui, il m'a imprégné. Et Bill Belichick qui est l'entraîneur de New England au football américain, ça c'est mon idole. Je le trouve tellement bon, chaque année il réussit à mettre une bonne équipe, même quand il perd ses meilleurs joueurs.
Mais mon idole reste mon fils, Kevin, pour moi c'est le meilleur joueur de tous les temps, mais c'est comme papa que je parle. Et le meilleur gardien de but, c'est ma fille, la plus jeune.
Mes 2 plus vieilles ont joué au hockey, mais c'était plus pour s'amuser, malgré que ma  plus vieille n'était pas mauvaise au hockey. Elle était défenseur aussi et ma deuxième, elle, c'était le basketball. Elle a fait du hockey au début, mais elle ne voulait rien savoir du hockey, alors elle s'est mise au basketball. Ils ont tous joué au plus haut niveau, c'est ça qui est drôle. Bien sûr, ils ont commencé "débutant", mais ils ont tous atteint le plus haut niveau, j'ai beaucoup de respect pour ça. Il y en a qui était plus « réserveuses », il y en a qui était des réguliers et il y en a qui était vraiment des bons joueurs. J'ai beaucoup de respect pour ça, ils n'ont jamais abandonné. Ils n'ont jamais laissé en chemin une équipe.
 
 
HH : Une prédisposition familiale ?
 
Oui, comme leur mère. Elle faisait aussi du basketball, beaucoup de basketball, elle est la supporter n° 1 des 4 enfants.
 
 
HH : Comment avez-vous fait le choix d'arrêter de jouer pour devenir coach ? Et un jeune coach, me semble t-il ?
 
Je vais vous raconter l'histoire.
J'étais ambigu entre 2 sports : le football américain, pour lequel j'avais beaucoup d'intérêt, et le hockey sur glace. Et en plus, il y avait les études.
Un été, j'avais été approché par l'organisation des Bruins de Boston pour aller à Providence qui est le club école dans la ligue américaine. Cet été-là, j'avais été à Ville Saint-Laurent, il y avait un défenseur qui s'appelait Raymond Bourque qui était sur la glace, l'un des plus grands défenseurs de l'histoire du hockey. Chez nous, on appelle ça la ligue de garage, c'est-à-dire qu'on joue 5 contre 5, on s'amuse et on s'entraîne aussi pour l'hiver.
Moi, j'étais sur la glace, et lui aussi. Et c'est là que j'ai pris la décision qu'une carrière professionnelle était utopique dans mon cas !  Alors je me suis concentré sur ce que j'aimais faire, enseigner.
Voilà, c'est comme ça que ça s'est fait !
Et puis, j'étais supposé venir jouer en Europe. La veille de mon départ, il y a une équipe qui a perdu son coach et on m'a demandé si je voulais venir entraîner juste pour la soirée. J'ai dit oui. Et après avoir fait  90 mn d'entraînement, je suis tombé en amour avec le coaching. Puis, j'ai annulé mon contrat en Europe et j'ai commencé le coaching. J'ai fini mon université où je faisais des études en psychologie.
 
 
HH : On va voyager un petit peu, suivez-vous les matchs d'une ligue en particulier ?
 
Je ne suis pas les autres ligues, que celle dans laquelle je suis impliqué. Je ne veux rien savoir des autres ligues. Je me concentre uniquement sur mon équipe.
J'ai de l'intérêt uniquement pour celle de mon fils et l'équipe de ma fille, et le travail de mes 2 plus vieilles. Ca, c'est mes sports à moi !
La seule ligue que je suis, ce n'est pas la Ligue Nationale de Hockey, c'est le football américain, je suis même abonné et je suis tous les matchs.
 
 
HH : Imaginons une affiche de rêve pour vous à Neuilly « les Bisons vs …. », quelle équipe existant dans le monde du hockey aimeriez-vous affronter ?
 
Disons qu'on est dans le monde magique, du monde imaginaire, du monde utopique et impossible, ce serait les Canadiens de Montréal.
 
 
HH : Un pronostic ?
 
J’essaierais de leur donner un peu d'argent pour qu'ils soient gentils avec nous ! Non, ça ne se comprend pas, ça serait une varlope totale !
Je ne sais pas, ce serait comme au foot ici, une petite équipe locale contre une équipe de ligue 1. Qu'est-ce que ça ferait !?
 
 
HH : Comme certains joueurs, avez-vous un rituel d'avant-match ?
 
Oui. Je suis très superstitieux. Et dans l'une de mes superstitions, c'est que je n'en parle pas.
 
 
HH : Donc la question sur le rituel d'après-match, même réponse ?
 
Oui. Vous savez une superstition ce n'est pas ça qui fait qu'on gagne ou qu'on perde. Une superstition, c'est se mettre dans un état d'esprit de compétition, on rit de ça, mais il ne faut pas rire de ça. C'est une forme de préparation.
 
 
HH : Aujourd'hui nous sommes à Bordeaux, chez les Boxers que vous allez affronter en match retour pour ces Play-Off 2014/2015. On dit qu'ici c'est particulier, l'ambiance est chaude, la patinoire souvent pleine. Que ressentez-vous lorsque vos joueurs entrent sur la glace à Bordeaux ?
 
Je trouve que les joueurs de Bordeaux sont extrêmement chanceux de jouer à Bordeaux. C'est un public qui est passionné par son équipe. Ils prennent le palet, la rondelle en sortie zone et ils vont déjà commencer à crier, et ça, ça soulève tellement une équipe, c'est incroyable.
J'ai un faible aussi pour les dirigeants de Bordeaux. Il y a vraiment de bonnes personnes là-dedans. Je ne dis pas ça car on est à Bordeaux mais s'il y a une organisation en France à qui je souhaite le meilleur, autre que contre nous, c'est le groupe à Stephan Tartari. C'est quelqu'un pour qui j'ai beaucoup de respect. Je le trouve tellement passionné, tellement gentil. Mais pour tout le monde, le coach aussi, Martin Lacroix, je le connais c'est un bon coach, un bon tacticien, il est fin, y'a pas à dire.
Et ici, il y a une bonne ambiance. Tu vois, dans les rues le monde sourit. Je me verrais m'installer à Bordeaux pour vivre. Je n'ai pas dit coacher, c'est quand même 2 choses. Mais pour vivre c'est bien. A chaque fois que je viens, on dirait que je suis chanceux, il fait toujours soleil.
 
 
HH : Samedi dernier, les Boxers ont accompli l'exploit de remporter une victoire à Neuilly. La première depuis des années pour les Bordelais sur votre glace.
Pour ce match retour, on inverse les rôles et c'est aux Bisons de détrôner les Boxers chez eux. Comment appréhende-t-on un tel match de play-off ?
 
Pour nous, ce ne serait pas un exploit car on a déjà vaincu ici.
Mais pour cette saison, ce serait « un exploit » si on veut appeler ça comme ça. Je suis convaincu que j'ai une très bonne équipe de hockey. Je cherche encore à savoir ce qui n'a pas fonctionné cette saison. Je suis convaincu que j'ai une équipe aussi bonne que les Boxers.
C'est très prétentieux ce que je dis, je sais. Peut-être que je suis dans un monde utopique dans mon cerveau, mais je suis convaincu d'avoir vraiment bâti une belle équipe cette année. C'est la plus grande question que je me pose continuellement, « pourquoi ». Je n’envie rien à l'équipe de Bordeaux concernant les joueurs car je trouve qu'on avait vraiment une équipe incroyable. La seule chose qui revient toujours, qui fait défaut, c'est notre attitude.
Alors ce ne sera pas un exploit pour moi, je m'attends à ce qu'on gagne, mais j'ai l'impression que, des fois, je suis tout seul à penser comme ça.
 
 
HH : Petit retour en arrière pour la fin. La saison dernière vous avez eu une très lourde sanction. Le club vous a soutenu et a maintenu votre poste. Qu'en tirez-vous comme conclusion ou leçon, quelle expérience ça a été ?
 
Tu touches un sujet chaud-là.
Je suis un des entraîneurs qui a le plus de respect pour les arbitres. On m'a accusé de quelque chose que je n'ai jamais voulu faire qui est de lancer la crosse sur l'arbitre, jamais dans ma tête c'est même passé proche. J'ai lancé la crosse dans le coin, justement pour faire attention. En plus, je connais Marie (l'arbitre), au personnel, elle est gentille. Elle, elle a mis ça de côté, je le sais.
Le match était perdu, je savais que je me ferais mettre en dehors du match, je l'ai même fait en connaissance de cause.
Je ne m'attendais pas à être sanctionné et je trouve que ça a pris une tangente blessante. Je l'ai vraiment pris personnellement. Ça m'est remonté jusqu'à la gorge. Ce n'est tellement pas représentatif de comment je pense, je n'ai pas d'agressivité envers un autre être humain.
Quand je jouais, j'étais batailleur, mais je faisais mon métier pour défendre mes coéquipiers. Oui, on se battait mais ce n'était pas pour faire mal à l'autre, c'était parce qu'il fallait protéger.
Quand j’entends que c'est un des pires gestes du hockey français, je me demande ce que Richard Martel va avoir comme suspension ! Si déjà moi j'ai eu 24 matchs, 12 + 12 !
Je connais bien Richard, c'est quelqu'un d'incroyable, il est très gentil, soit dit en passant. Il a fait une erreur, il a fait une erreur, mais on est tous responsables de nos gestes. Je trouverais ça aussi plat que le gamin qui est allé se battre, soit suspendu méchamment. Car tu es tellement sous l'emprise du coach, c'est dur pour un jeune de dire non à un coach. J'espère juste qu'ils ne donneront pas 3 ans de suspension au petit.
 
 
HH : C'était la dernière question, merci beaucoup pour toutes ces réponses.
Nous vous souhaitons une très bonne soirée et un très bon match.
Un petit mot pour les lecteurs de Hockey Hebdo ?
 
Je trouve ça bien. A partir du moment où l'on peut faire des interviews et apprendre à connaître un petit peu mieux le monde qu'il y a dans ce milieu-là. Pas juste les Canadiens mais tout le monde, moi je trouve ça bien. Parfois on se fait une image, et l'image de Frank Spinozzi, c'est l'image de quelqu'un de très dur, très méchant, très autoritaire, ce que je suis (dit-il en rigolant).
Des fois, je regarde des articles sur d'autres personnes, je les écoute parler puis on se fait une opinion différente. Je nous trouve parfois comme pour les chevaux, avec des œillères sur nos opinions sur les autres.
 
Longue vie, en espérant qu'ils puissent continuer à faire leur travail, et puis tous les associés qui les aident, comme le travail que tu fais, les journalistes, les associés, je trouve ça merveilleux.
Ma relation avec les journalistes en France est incroyable. Incroyable ! C'est merveilleux le respect, je trouve qu'il y a vraiment une ouverture d'esprit pendant ces interviews-là. On prend le temps de s'écouter, de vraiment partager des manières de penser.
J'avais fait une interview à Lyon, l'année passée, car je suis né à Bourgoin-Jallieu, donc ils avaient fait quelque chose là-dessus. Et j'étais content car ce n'était pas que des questions de hockey, un peu comme toi. Ça avait rapport à nos vies, nos cheminements, nos modes de pensées, est-ce que j'étais retourné à Bourgoin-Jallieu…
 
Alors je souhaite longue vie , quand c'est du bon journalisme, pas du journalisme à sensation. Je pense qu'il y a moyen de faire quelque chose de plus vrai. Chez nous, au Canada, ça commence à être à la mode ce style d'entrevue, plus que le sensationnel.
 
 
HH : Merci à Frank Spinozzi pour sa réelle sympathie, sa joie de vivre et cette interview où il s'est volontiers confié à nous. Un moment très agréable !
 
 
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