Bonjour Yannick, peux-tu te présenter ?
Je m'appelle Yannick, j'ai 41 ans, je vis dans le sud manche avec ma femme et mes deux enfants. Je suis programmateur informatique Chez Samsic, une grande entreprise de services à Rennes.
Je suis amputé fémoral droit et ma jambe gauche est restée en mauvais état suite à un accident de la circulation en 1991.
Je suis venu vers le para-hockey au club de Rennes en septembre 2021 sous l'influence de mon vieux compère Adrien Liard avec qui j'ai joué pendant 15 ans au handibasket.
Parle-nous de ta préparation générale ? (En glace et hors glace)
Depuis le premier stage France à Vaujany et particulièrement le tournoi qui a suivi à Elblag en Pologne, je me suis engagé dans une quête de performance avec pour objectif les championnats du monde de 2022 pour y performer mais aussi et surtout pour y mériter ma place.
Partant de zéro, car j'étais débutant en para-hockey et bien rouillé de ma pause sportive entre le basket et le hockey, ma préparation a consisté à mettre en place une rigueur et une constance pour avoir une endurance de motivation jusqu'à l'objectif.
La principale contrainte était le temps : je n'avais même pas un an avant l'échéance et surtout au quotidien, je devais jongler entre le sport, le travail et ma famille.
©World Para Ice Hockey
Coté hockey, il n'y avait pas trop à tergiverser, je devais prendre tous les créneaux de glace qui passaient en plus des deux séances d'une heure que nous avons le lundi dans notre club à Rennes.
Pour le maniement du palet, je me suis acheté une plaque de plastique pour travailler dans mon garage. Assis devant ma citerne de fioul à laquelle j'ai attaché des élastiques de deux niveaux de tension.
Une fois semaine, je peux soit faire un peu de musculation, soit du maniement de palet soit les deux en même temps : un bras à la crosse, l'autre à l'élastique.
Coté physique, j'ai régularisé ma pratique de la natation. Je pratique toujours la même séance sur mon temps du midi : 1000 mètres de crawl avec tuba. Pas plus, pas moins. C'est plus une quête de bien-être que de performance. Dans l'eau, j'oublie mon corps cassé. De plus, l'eau a pour moi la vertu de m'aider dans la récupération, les petits bobos et autres courbatures. A l'approche des compétitions je pousse à deux séances par semaine également.
Au travail, j'ai la chance d'avoir une salle de sport. Ma séance commence toujours par 15 minutes de cardio avec du vélo. Ensuite je fais généralement 20 minutes de tirages horizontaux et verticaux et ensuite 20 minutes de spécifiques. Soit des exercices qui miment la poussée de la luge, soit des exercices qui miment les shoots. Pareil, à minima je fais une séance par semaine mais je pousse à deux à l'approche d'objectif.
J'ai enfin travaillé sur mon sommeil car c'était une problématique lors des déplacements. Je me couche très tôt. Lors des déplacements, je pratique de la relaxation et si je suis tout de même en difficulté, j'ajoute un comprimé aux plantes composé d'un peu de mélatonine. A l'approche du déplacement à Bangkok, j'ai particulièrement suivi les conseils prodigués par le staff en matière de décalage horaire.
Il me reste un problème de surpoids à gérer. Je suis en bien meilleure forme qu'il y a un an avec ce programme mais je suis toujours trop lourd. J'ai amélioré ma nutrition mais j'ai toujours un problème d'organisation entre mon travail, la famille et le sport qui me pousse vers de la nourriture facile mais de mauvaise qualité et/ou déséquilibrée en quantité.
©World Para Ice Hockey
Quelles sont les exigences du para-hockey ?
A mes yeux, l'exigence du para-hockey si on cherche à être compétitif, c'est le temps. Apprendre très vite tout en faisant preuve de patience.
On a très peu de temps de glace pour devenir performant. Il est donc compliqué de prendre le temps de travailler des points précis de manière poussée.
Ça concerne aussi le matériel, les réglages de luge sont primordiaux dans notre évolution sur la glace. Elle doit faire partie de nous. Mais on peut difficilement se permettre de tenter des réglages différents car s'ils ne sont pas concluant, on peut facilement perdre une heure de glace pour ressortir de sa luge et refaire les réglages.
Mais la patience reste la clé de tout et il est obligatoire de prendre le temps d'essayer, de se tromper, d’essayer encore pour réussir.
Quel est ton plus beau souvenir dans ce sport ?
Notre première victoire avec l'EDF contre l'équipe autrichienne au tournoi d'Olomouc en Tchéquie !
Comme je l'avais vécu au basket, où nous étions une équipe nouvelle, très jeune et sans expérience, lorsque vous prenez des « roustes » tous les weekends, je peux vous dire qu'on se souvient de sa première victoire !
Parle-nous du stage EDF ? Déroulé, ambiance…
On a fait plusieurs rassemblements.
Du coté des officiels, le premier à Vaujany en novembre 2021, on a enchainé ensuite avec le tournoi en Pologne et enfin, en septembre dernier, un autre tournoi en Tchéquie.
Du coté des non officiels, c'est à dire que les frais étaient pris en charge par les joueurs et leurs clubs, on en a fait plusieurs à Rennes, Neuilly, Tours et à Rouen.
L'ambiance y est très bonne car on a le même objectif. On se connait maintenant très bien, on a les mêmes contraintes, les mêmes attentes. Le groupe formé par David, le coach, est homogène dans les capacités et les comportements ce qui nous donne un groupe très solidaire dans l'adversité.
Ces rassemblements se déroulent tous de la même manière, on privilégie les temps de glace. On a des temps d'échauffements et d'étirements évidement mais peu de travail physique hors glace. Les moments de réunions sont principalement consacrés à du management.
©World Para Ice Hockey
Tu as participé au championnat du monde à Bangkok ? Comment s’est déroulé la compétition ?
C'était intense ! Un long chemin ! Mais c'était une superbe expérience.
C'était l'aboutissement d'un an de travail pour la plupart de l'équipe. Avec beaucoup de sacrifices pour atteindre cet objectif.
Faire partie d'un groupe France isolé à l'autre bout du monde était une expérience très intéressante. Les émotions y sont décuplées, positives comme négatives.
C'est là qu'on voit que la gestion des tempéraments d'une équipe est tout aussi primordiale que les capacités techniques et physiques.
Point de vue jeu, on a été à notre niveau et notre place est méritée. On était supérieur aux autrichiens et aux thaïs mais les anglais et la révélation kazakhe, et son hockey académique, sont belle et bien des équipes du groupe B.
Certains pensent qu'il était trop tôt pour y aller. Moi je pense qu'il faut saisir les opportunités dès qu'elles se présentent.
2023… Des objectifs ?
Mon objectif 2023 est pour l'instant le Championnat de France que nous souhaitons gagner avec mon équipe Rennes Cormorans Hockey Club.
Nous n'avons pas encore d'échéances pour l'équipe nationale.
Merci à toi Yannick pour ce bel échange.
Il est certain que comme tout sportif, Yannick cherche l’équilibre parfait entre ses contraintes et ses ressources.