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Hockey sur glace - Tribune libre de Tristan Alric
Hockey sur glace - 35 / QUEL AVENIR POUR LE HOCKEY FRANÇAIS ?
 
Alors que le hockey français tente de retrouver une activité normale cette saison, Tristan Alric estime que l’heure est venue pour cette discipline de faire un choix très important, voire historique, concernant son avenir. Analysant le contexte actuel, le créateur de la Coupe Magnus explique ce qui l’emmène à penser que des décisions claires doivent être prises rapidement par les dirigeants du hockey tricolore.
 
 
Tribune N°35

 
-  QUEL AVENIR POUR LE HOCKEY SUR GLACE FRANÇAIS ? -

La saison sportive 2021-2022 s’achèvera par un changement très important pour l’avenir du hockey sur glace français. Je veux parler de l’élection, au mois de juin prochain, du nouveau Comité directeur de la FFHG. L’évènement sera d’autant plus attendu qu’il y aura en même temps la désignation d’un nouveau président puisque Luc Tardif va mettre un terme à son long mandat qui aura duré 18 ans au total !
Dans cette période record, qui lui a permis d’égaler celle du légendaire Jacques Lacarrière, le président Luc Tardif aura dirigé l’ancienne Autorité Exécutive du Hockey Français (AEHF) puis exercé quatre mandats successifs à la tête de la nouvelle fédération autonome depuis sa création en 2006. Mais son départ pourrait peut-être avoir lieu dès la fin de ce mois de septembre, si Luc Tardif était élu président de l’IIHF puisqu’il fait partie des cinq candidats officiels en lice au congrés de St Petersbourg.
 
A l’occasion du changement de gouvernance fédérale qui se profile, notre sport ne pourra pas faire, à mon avis, l’économie d’une sérieuse remise en question. Non pas que je juge le bilan de Luc Tardif négatif, loin s’en faut ! Au contraire, en toute objectivité l’histoire rendra justice à ce franco-canadien pour son apport indéniable à notre discipline. Ne serait-ce que pour lui avoir permis de devenir indépendante. Malgré les inévitables critiques, mais aussi des erreurs de communication et les tensions quelles ont provoqué ces derniers temps.
Si une remise en question globale me semble nécessaire, c’est tout simplement parce que les hommes vont changer avec des caractères et des méthodes différentes. D’autant que le nouveau président devrait être - à priori - l’ancien hockeyeur international et homme d’affaire Pierre-Yves Gerbeau.   
Ensuite, parce que la longue expérience que j’ai acquis comme journaliste et historien du hockey sur glace français, m’amène aujourd’hui à la conclusion que notre sport favori est désormais arrivé à la fin d’un cycle et se trouve à la croisée des chemins. Autrement dit, je suis persuadé que pour continuer à avancer l’heure d’un nouveau grand choix politique a sonné.
 
De quel grand choix s’agit-il ? Comment suis-je arrivé à cette conclusion que je juge vitale ? D’abord en observant avec beaucoup de regret que « l’idylle » médiatique dont bénéficiait jadis notre sport est malheureusement terminée depuis déjà plusieurs années pour les diverses raisons que j’ai déjà expliqué en détail dans ma Tribune numéro 6.
Ensuite, il y a la rétrogradation récente de l’équipe de France masculine dans la Division 1 mondiale qui nous prive depuis deux ans de sa présence dans l’élite planétaire. C’est un coup très dur. Sans parler de son nouvel échec cet été lors du tournoi de qualification olympique organisé en Lettonie qui la prive également depuis maintenant 20 ans de la vitrine indispensable que représentent les J.O. d’hiver. Cette double absence des hockeyeurs tricolores sur la scène internationale, aux Championnats du monde et aux Jeux olympiques, alors que nos Bleus ont été capables pourtant de battre parfois avec héroïsme les plus grandes nations sur un match, est un grave handicap pour l’image du hockey et pour sa promotion car cette absence diminue considérablement l’intérêt de la presse et du grand public néophyte pour notre sport.
 
Si j’ajoute un autre fait récent, à savoir que le volley et le hand, ont été sacrés champions olympiques lors des récents J.O. de Tokyo, pour moi l’affaire est malheureusement très mal engagée pour ne pas dire entendue ! Car le hockey sur glace français ne pourra plus espérer concurrencer ces deux sports comme ce fut le cas dans le passé en termes d’exposition dans la presse. D’autant qu’il faut ajouter le basket dans la liste des sports d’équipe concurrents qui nous devancent désormais. Il suffit de lire le journal sportif L'Equipe pour se rendre compte de la différence de traitement de ces sports, évoqués presque quotidiennement, avec le hockey traité en revanche que très épisodiquement malgré un fort coefficient de sympathie et de curiosité.
Bref, après ce « décrochage » avec le BHV (Basket-Hand-Volley), c’est à contre-cœur que je suis obligé de constater aujourd’hui que le hockey sur glace est devenu désormais en France un sport marginalisé. Il faut être lucide : aux yeux de la presse nationale et du grand public, le hockey a désormais l’image, certes sympathique mais un peu humiliante, d’un sport « exotique » pour reprendre l’expression employée par plusieurs de mes confrères journalistes.
 
Partant de ce constat cruel que le hockey sur glace ne sera jamais un grand sport en France (n’oublions pas qu’il comptait seulement 21 969 licenciés avant la crise sanitaire), l’humilité s’impose face aux 685 000 licenciés du basket, 550 000 du hand et 180 000 du volley qui bénéficient de surcroît dans leur pratique d'un coût de revient beaucoup moins élevé. Il me semble urgent que nos futurs dirigeants organisent à nouveau une sorte d’états généraux du hockey sur glace français comme ce fut le cas en 2001 à Grenoble. Toutefois, une assemblée d’experts plus réduite sera sans doute un moyen beaucoup plus efficace et plus facile à organiser qu’un barnum pléthorique. Mais quelle que soit l’option choisie, il est urgent à mon avis qu’une table ronde se penche rapidement sur l’avenir de notre sport.
 
En effet, en prenant en compte la réalité des choses, il existe à mon sens que deux possibilités d’action pour nos futurs dirigeants fédéraux et nos présidents de clubs. D’abord, il y a la solution de facilité qui consiste à se résigner et à continuer de diriger le hockey sur glace français « à la petite semaine », reclus dans son microcosme, sans autre ambition que gérer ses affaires au jour le jour en espérant des jours meilleurs. Autrement dit, en considérant son déclin médiatique et ses résultats sportifs actuels comme des choses inéluctables en essayant juste de rester de bons gestionnaires d’une discipline pratiquée entre passionnés, uniquement pour le plaisir et en grande majorité par des amateurs.
 
Je comprends que cette façon minimaliste de voir les choses, qui a ses partisans, peut se défendre. Mais ce n’est pas mon opinion, ni celle de la grande majorité des fans de hockey puisqu’ils remplissent nos patinoires avec beaucoup d’enthousiasme ! Car, dans ce cas, c’est accepter la poursuite de championnats stagnants, donc sans progression, notamment celui de la Ligue Magnus, qui est censé représenter la « vitrine », avec ses nombreux renforts étrangers, certes volontaires, mais de seconde main et ses joueurs français qui se contentent également d’une compétition « professionnelle » qui n’en a uniquement l’apparence au point que nos meilleurs talents continuent leur exode régulier à l’étranger faute de perspective plus motivante chez nous.
 
L’autre possibilité - celle que je défends - c’est de continuer à avoir la foi et de croire que le hockey sur glace conserve encore, malgré le contexte actuel défavorable, des atouts potentiels pour refaire surface médiatiquement et sportivement. Doit-on désespérer en assistant actuellement à la construction de nouvelles patinoires, comme par exemple celle d’Angers récemment, ou à l’agrandissement de celle de Rouen qui s’est offert une nouvelle tribune avec 350 places supplémentaires ? Même si leurs capacités restent trop limitées et jettent le doute pour un hockey en expansion ? C’est un sujet qui mérite d’être débattu.
Il faut donc profiter des prochaines élections au comité directeur et à la présidence de la FFHG, pour tenter de donner une nouvelle impulsion au hockey français en faisant notamment rapidement un signe fort en direction de tous les observateurs pour marquer leurs esprits et remotiver les troupes.
 
C’est pour cette raison que je suis partisan d’organiser ce que j’appellerais plus précisément un symposium (réunion de spécialistes selon le dictionnaire) et profiter de l’occasion pour faire pour la première fois un bilan rétrospectif des 50 dernières années d’évolution de notre discipline. Pourquoi suis-je en faveur d’un retour analytique sur une période aussi longue ? Non pas pour ressasser indéfiniment le passé, mais tout simplement pour bien identifier ses maux en faisant apparaître sur un bilan avec deux colonnes distinctes, ce qui a marché ou pas depuis la fameuse opération gouvernementale baptisée à l’époque « le plan des cent patinoires » qui fut lancée juste après les J.O. de Grenoble en 1968 et mis en pratique dès le début des années 1970.
 
Lors de cette nouvelle table ronde, il faudrait mettre en exergue quelles furent, depuis le lancement de ce plan, les belles réussites (car il y en a eu !), mais aussi les nombreux échecs du hockey sur glace français afin de ne pas reproduire les mêmes erreurs. L’objectif de cette réunion exceptionnelle serait de faire enfin une analyse approfondie et sans concession de l’état du hockey français en identifiant précisément ses faiblesses et ses atouts, mais surtout en s’achevant par des propositions concrètes.
Pour sortir notre hockey de son isolement, il faut impérativement trouver des nouvelles solutions novatrices qui permettront d’apporter des corrections à la fois dans les domaines sportifs et de la communication afin de sortir notre sport favori de l’ornière et continuer à le faire progresser.

Je publierai un bilan positif et négatif dans une nouvelle « Tribune Libre » mais je suggère d’ici là que nos nombreux lecteurs réagissent et donnent également leur avis pour alimenter positivement ce débat qui s’imposera inévitablement aux nouveaux élus.

 


Depuis plus de quarante ans Tristan Alric a été l’acteur et le témoin privilégié de l’évolution du hockey sur glace en France. D’abord comme joueur puis comme arbitre. Ensuite, en devenant le journaliste spécialiste du hockey sur glace dans le quotidien sportif L’Equipe pendant plus de vingt ans. Auteur de nombreux livres et d’une récente encyclopédie qui font référence, Tristan Alric a marqué également l’histoire du hockey français en étant le créateur de la Coupe Magnus et des divers trophées individuels. Avec un tel parcours, il est donc bien placé pour avoir une analyse pertinente sur notre sport favori. Le site Hockey Hebdo est donc heureux de lui permettre de s’exprimer régulièrement dans cette rubrique.
 
 


 
 
Lieu : Média Sports LoisirsChroniqueur : Tristan Alric
Posté par Christian Simon le 17/09/2021 à 11:30
 
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Réactions sur l'article
 
Fildor a écritle 26/09/2021 à 10:24  
Cher monsieur Alric,
Personne ne peut discuter que vous ayez vous-même « la foi ». Avec le départ de Luc Tardif, figure emblématique du hockey français, la page se tourne obligatoirement.
Fin politique, rusé, malin, intelligent, il a fait ce que le hockey français est aujourd’hui. Bravo et merci à lui. Le travail fait est tout à fait remarquable. Et donc reconnu par ses pairs internationaux.
Après cette phase absolument nécessaire mais plus politique que sportive, il va falloir sans doute plus s’orienter vers le sportif que le politique.
Comme le hockey en France n’est que fédéral, c’est donc la fédération qui donnera l’impulsion (ou pas).
Posons tous les crayons, réfléchissons, et ayons tous (ceux qui ont « la foi ») le courage d’émettre notre avis. C’est le moment.


Faiblesses du hockey français :

La grande majorité des amateurs du hockey français les connaissent :

- Une fédération fermée et verrouillée comme un club privé

- Une présidence à candidature unique (contrairement à l’IIHF)

- Aucun esprit critique, toute idée novatrice est rejetée

- Connaissances techniques individuelles et collectives très insuffisantes et certaines croyances techniques dépassées depuis plus de 20 ans

- Chez les ados, une politique de vedettes qui empêche tous les autres, c’est-à-dire l’écrasante majorité, de se développer en confiance. Ces vedettes ont souvent plus de pouvoir que le coach qui est obligé de composer pour garder son emploi

- Championnat sénior : chaque équipe est constituée de 2 équipes :

- une équipe principale d’étrangers

- une équipe secondaire de français


Atouts du hockey français :

- Il est équipé et les structures sont présentes

- Les championnats existent, à plusieurs niveaux et sont plutôt bien organisés

- Les entraîneurs des jeunes sont professionnels, ce qui est un atout considérable bien que très mal exploité.

- La plupart des joueurs français ont une vraie culture du jeu collectif (peu présente en Amérique du nord) grâce aux autres sports, le foot principalement. C’est un atout majeur car le hockey mondial, comme tous les sports collectifs, devient de plus en plus collectif (offensivement et défensivement)

- Les financements sont là ce qui n’est pas le cas de tous les sports. Mieux les exploiter n’est qu’une question de stratégie

Solutions concrètes

1/ le passage obligé

En France, nous avons un guide unique qui est la fédération (ce qui n’est pas le cas en Amérique du Nord). Soit nous aurons une fédération qui aura « la foi » en ses pratiquants nationaux et qui mettra tout en place pour les développer, soit nous ne l’aurons pas.
Si on veut gagner, elle doit s'orienter principalement sur le développement qualitatif et quantitatif du licencié français quel que soit son âge, et doit se donner les moyens de repérer les « bons » capables de jouer un jeu moderne

Exemples :
- Cesser de faire des sélections par téléphone mais les organiser sur la glace.
- Organiser des show cases payants chaque année pour que chaque club puisse venir y « piocher » des joueurs qui ont des ambitions.
- Organiser des stages de développement de haut niveau pour les plus de vingt ans
- Donner l’habitude aux club de recruter des joueurs qu’ils ont déjà vu jouer.

2/ Les joueurs étrangers :
Ils coûtent trop chers en budget et surtout en temps de glace. Leur nombre doit impérativement être limité (6 max ?) par un système de bonus financier pour les clubs qui jouent « français » et malus pour les autres ce qui est normal car le hockey est principalement financé par des fonds publics.

3/ changement de mentalité
- Lutter contre le french bashing permanent des responsables du hockey et la glorification permanente elle aussi du joueur étranger que le responsable a réussi à attirer.
- Se lever contre ces discours de coachs ou de présidents qui expliquent qu’ils sont exigeants pour les étrangers et beaucoup moins pour les français. Nous n’avons pas besoin de leur mépris. C’est une question de confiance en nos joueurs nationaux.
- Cessons de croire que le hockey est un jeu à 2 lignes et demie et le rythme et l’intensité des matches, donc leur attractivité, y gagnera grandement

4/ devenir ambitieux raisonnablement
L'ambition, c’est qu’en 5 ans, nous ayons des équipes au minimum du même niveau qu’aujourd'hui mais avec principalement des joueurs français bien formés et qui jouent un jeu très différent. Notre atout, c’est notre culture du jeu collectif. Cessons de glorifier le joueur qui traverse la patinoire tout seul. Ce type de jeu est révolu.
Pour y parvenir il faut que le développement technique des joueurs soit plus complet ce qui permettra un jeu collectif offensif et défensif, un jeu de pression, un jeu intense, bien supérieur à ce que l'on voit aujourd'hui dans nos championnats.

4/ revoir le statut et les objectifs des entraîneurs des jeunes. Instaurer la mission de développeur. La gratifier.
 
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