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Hockey sur glace - Ligue Magnus
LES LIENS ÉTROITS DE LA NHL AVEC LA FRANCE
 
Il y a déjà longtemps que le circuit nord-américain de la NHL entretien des contacts avec le hockey sur glace français malgré la grande différence de niveau de jeu. Tristan Alric, créateur de la Coupe Magnus, rappelle les événements, parfois étonnants et inattendus, souvent méconnus ou oubliés, qui ont permis aux professionnels d’outre-Atlantique de s’intéresser au championnat de France.
 
Média Sports Loisirs, Hockey Hebdo Tristan Alric le 29/10/2021 à 11:30
Tribune N°38

 
-  LES LIENS ÉTROITS DE LA NHL AVEC LA FRANCE -

Le circuit nord-américain de la NHL a beau évoluer sur une autre planète, ses acteurs ont toujours eu des contacts réguliers avec le hockey sur glace français. Ces liens étroits - surtout entre le Canada et notre pays - se sont noués il y a exactement un siècle cette année ! En effet, c’est en 1921 que l’américain Gerry Geran, qui avait fait partie des Wanderers de Montréal lors du lancement de la NHL, décida de traverser ensuite l’Atlantique pour venir jouer avec le « Club des Sports d’Hiver de Paris ». La présence de cet américain du Massachusetts fut un événement à l’époque puisqu’il remporta non seulement le titre de champion de France (en inscrivant les deux tiers des buts de l’équipe parisienne !) mais Gerry Geran entra par la même occasion dans l’histoire de notre championnat car il fut le premier joueur de la NHL à évoluer en France.
 
Un autre événement se produisit en 1935 pendant l’époque mémorable de la grande patinoire du « Vel’d’Hiv » à Paris, lorsque la NHL manifesta à nouveau son intérêt pour le hockey Français. Mais cette fois, c’est l’ancien international de Chamonix Albert Hassler, devenu l’un des renforts les plus populaires des Français Volants, qui s’est vu proposer un contrat professionnel avec les Rangers de New York ! Une proposition d’autant plus flatteuse et prestigieuse pour le célèbre français que la NHL comptait seulement huit clubs à l’époque et que les places étaient donc très convoitées.
 
Très honoré par cette offre, Albert Hassler n’a cependant pas accepté ce contrat. Il me l’a raconté lorsque j’ai eu l’occasion de le rencontrer à Chamonix en 1990, quatre ans avant son décès. « J’ai refusé d’abord parce qu’à cette époque il n’y avait pas de lignes d’avion régulières. Le voyage en Amérique se faisait en bateau et il était très long. Ensuite, parce que dans mon contrat, il était prévu que je toucherais uniquement des primes de matches en fonction de mes résultats. Si je faisais une mauvaise passe, il était indiqué que j’aurais une amende de cinq dollars ! Même chose en cas de punition. J’ai donc calculé que si j’allais à New York, au bout de trois ou quatre matches, j’aurais été sans le sou ! Je n’ai donc pas voulu prendre le risque de m’exiler aussi loin pour rien. »
 
On l’a oublié également, mais deux clubs de la NHL sont déjà venus jouer en France ! En effet, comme le prouve l’affiche publiée en illustration ci-dessus, au mois de mai 1959, les Bruins de Boston et les Rangers de New York ont fait escale à Paris, à l’occasion d’une tournée organisée en Europe, pour disputer deux matches exhibition sur la patinoire de Boulogne-Billancourt. Ces deux rencontres, opposant deux équipes phares de la NHL, qui susciteraient à coup sûr un grand engouement aujourd’hui, ne firent pourtant pas recette il y a 62 ans ! D’abord, parce que le hockey sur glace était encore trop confidentiel dans notre pays à l’époque, mais ensuite en raison du prix trop élevé des billets. A tel point que le derby parisien entre l’ACBB et l’US Métro, qui eut lieu trois jours plus tard, attira deux fois plus de monde comme l’a raconté le regretté Jean Tarenberque qui était le trésorier du club de Boulogne.
 
En 1967, l’ancienne grande star de la NHL, Maurice Richard, s’est intéressé à son tour au hockey français puisqu’il est venu jouer à Grenoble à l’occasion d’une tournée sur le vieux continent effectuée par une équipe « Old Stars » de Montréal. L’entraîneur-joueur canadien de Grenoble Pete Laliberté et ses coéquipiers français, qui avaient une admiration sans borne pour le légendaire « Rocket », gardèrent un souvenir inoubliable de son passage. Ils réalisèrent un rêve en côtoyant leur idole en chair et en os au cours de cette soirée historique d’autant que Maurice Richard fit un show époustouflant en marquant trois buts pour son équipe (victoire 13-4 pour Montréal). Quelques années plus tard, Maurice Richard reviendra patiner à nouveau sur plusieurs patinoires françaises, comme celles de Viry-Châtillon, Grenoble, Chamonix, Gap ou Briançon à l’occasion d’une tournée avec une équipe canadienne baptisée « les Médias de Québec ». Mais cette fois Maurice Richard tint le rôle plus discret de Guest-star en se contentant de porter le maillot d’arbitre.
 
Le flirt entre la NHL et le hockey français s’est poursuivi avec la venue d’une autre superstar canadienne, Guy Lafleur, surnommé le « démon blond », qui a rechaussé ses patins à l’occasion du tournoi inaugural de la grande patinoire du Palais Omnisports de Paris-Bercy en 1985. Deux ans plus tard, le suédois Anders Kallur, qui avait remporté à quatre reprises la Coupe Stanley avec les Islanders de New-York, a accepté de débarquer également en France pour devenir momentanément l’entraîneur du club de Chamonix. Puis, ce fut Richard Sévigny, élu meilleur gardien de la NHL (il remporta le trophée Vézina) et vainqueur de la Coupe Stanley avec les Canadiens de Montréal, qui devint également le coach de Chamonix en 1989 puis de Briançon en 1990.

 
Photo hockey Ligue Magnus - Ligue Magnus - LES LIENS ÉTROITS DE LA NHL AVEC LA FRANCE
Albert Hassler et Tristan Alric en 1990 lors de leur rencontre à Chamonix

Cette année-là justement, la NHL a établi un nouveau contact important avec la France puisque l’ancien capitaine des Canadiens de Montréal, Bob Gainey, vainqueur à cinq reprises de la Coupe Stanley, débarqua à son tour en 1989 pour venir signer contre toute attente un contrat retentissant avec les « Ecureuils » d’Epinal. Pourtant l’équipe des Vosges évoluait seulement en Division 1 ! L’arrivée inattendue de Bob Gainey fit beaucoup de bruit bien au-delà de la Lorraine puisqu’elle fut relatée à la une de tous les journaux au Canada laissant pantois également tous les clubs du hockey sur glace français qui ne s’attendaient pas à tant d’honneur.
 
Deux ans auparavant, au mois de septembre 1987, le club des Français Volants de Paris avait eu aussi un contact qui allait s’avérer prémonitoire et très flatteur avec la NHL en décidant de recruter Claude Julien lors du lancement de sa troisième saison disputée dans la grande patinoire de Bercy. En effet, ce nouveau renfort canadien, allait faire parler de lui beaucoup plus tard dans le circuit professionnel nord-américain. Car si Claude Julien fit une apparition éphémère à Bercy, ce dernier connut par la suite une grande réussite en NHL puisqu’il devint, vingt ans plus tard, le coach du club mythique des Canadiens de Montréal pendant trois saisons. Il dirigea ensuite les Devils du New Jersey avant d’être nommé en 2008 l’entraîneur des Bruins de Boston. Sacré meilleur coach de la NHL dès son arrivée à Boston, Claude Julien a réussi l’exploit de remporter la Coupe Stanley avec les Bruins en 2011.
 
Depuis que le hockey sur glace français a noué des liens réguliers avec le Canada, c’est une cinquantaine d’anciens professionnels de la NHL qui sont venus au fil du temps poursuivre ou terminer leurs carrières sportives en France. Dans notre championnat, il y a eu quelques belles « pointures » comme par exemple Brian Propp à Anglet (15 saisons en NHL), André Saint-Laurent à Bordeaux, Rouen et Clermont-Ferrand (11 saisons en NHL), Brad Smyth à Morzine (9 saisons en NHL), Charles Bourgeois aux Français Volants de Paris (7 saisons en NHL), Steven Reinprecht à Mulhouse, vainqueur de la Coupe Stanley avec Colorado (5 saisons en NHL), l’international russe Evgueni Davydov à Amiens (5 saisons en NHL) et enfin Paulin Bordeleau (3 saisons en NHL) à Tours, Megève et club du Mont-Blanc.
 
Ajoutons qu’à la fin du mois d’octobre 1997, pour désigner le nouvel entraineur de l’équipe de France afin de succéder à Dany Dubé, le Comité national de hockey se montra prétentieux puisqu’il envisagea de recruter dans un premier temps le canadien Jean Perron qui avait remporté la Coupe Stanley avec le club mythique des Canadiens de Montréal onze ans plus tôt. Mais ce fut finalement le deuxième candidat pressenti par le CNHG qui fut choisi. Une autre sacrée pointure issue de la NHL ! En effet, on apprit avec un grand étonnement l’arrivée à la tête de la sélection tricolore d’une véritable légende du hockey mondial, le célèbre entraîneur américain Herb Brooks (57 ans) qui devait décéder quelques années plus tard dans un accident de voiture.
 
Herb Brooks avait connu la consécration en étant d’abord le coach de l’équipe des USA lorsque celle-ci fut sacrée, à la surprise générale, championne olympique en 1980 lors des jeux d’hiver organisés à Lake Placid. Il avait réalisé alors le fameux « Miracle sur glace » en remportant avec de jeunes hockeyeurs universitaires, menés à la dure comme des GI’S, une médaille d’or inespérée en battant à domicile une armada soviétique réputée pourtant invincible (4-3). Herb Brooks devint ensuite le coach de plusieurs équipes de la NHL comme celle des Rangers de New York, des Devils du New Jersey et des North Stars du Minnesota. Autant dire que la carte de visite d’Herb Brooks était impressionnante ! Mais avec l’équipe de France, il ne réalisa pas un nouveau miracle lors de son éphémère présence derrière le banc des Bleus à l’occasion des JO de Nagano en 1998.
 
Lors de la grande grève qui paralysa la NHL en 2004, ce lock-out provoqua un exode massif vers les pays d’Europe et cinq joueurs professionnels de renom n’hésitèrent pas à choisir le championnat de France élite qui venait juste d’être rebaptisé « Ligue Magnus ». Le club de Mulhouse ne se contenta pas de recruter le défenseur Steve Montador mais aussi son coéquipier des Flames de Calgary Steven Reinprecht qui accepta de venir également renforcer le club du Haut-Rhin. De son côté, Steve Gainey (13 matches avec Dallas), le fils de Bob, retourna à Epinal sur les traces de son adolescence. Par ailleurs, Brad Ference (Phoenix) vint à Morzine et Mark Rycroft (Saint-Louis et Colorado) à Briançon.

En 2010, un nouveau rapprochement de la France avec la NHL se produisit une fois encore avec pour cadre l’ancienne patinoire du Haras à Angers lors de l’arrivée, à la fin du mois d’août, de Kévin Constantine. En effet, ce dernier avait été succéssivement le coach des Sharks de San José, des Flames de Calgary, des Penguins de Pittsburgh et enfin des Devils du New Jersey dans la NHL ! A 51 ans, ce technicien très expérimenté pouvait faire valoir également deux trophées de meilleur coach, un dans la NHL et un dans l’IHL. De plus, Kévin Constantine remporta dans la Ligue Internationale (IHL) le titre de champion, la Turner Cup, avec les Blades de Kansas City… Mais le séjour du célèbre coach américain à Angers fut très éphémère puisqu’au cours de la saison le club d’Angers laissa partir Kévin Constantine vers un défi suisse beaucoup plus lucratif et palpitant à Ambri-Piotta puisqu’il toucha un salaire six fois plus important...
 
 
Photo hockey Ligue Magnus - Ligue Magnus - LES LIENS ÉTROITS DE LA NHL AVEC LA FRANCE
Eric Ropert, Pierre Boivin et Luc Tardif en 2008 au Centre Bell lors du match Canadiens de Montréal - Wild de Minnesota

S’il fallait une preuve supplémentaire des bonnes relations nouées entre la France et la NHL, je rappelle qu’en 2008, à l’invitation de Pierre Boivin, le président du club mythique des Canadiens de Montréal, Luc Tardif l’ancien président de la FFHG ainsi que le directeur général Eric Ropert, se sont rendus au Québec (voir photo ci-dessus) pour assister au match de présaison Montréal-Minnesota disputé au centre Bell de Montréal le 4 octobre. Depuis cette entrevue, le projet de l’organisation d’un match de la NHL délocalisé à Paris (comme ce fut récemment le cas à Stockholm en Suède, à Prague en République tchèque et à Helsinki en Finlande) alimente régulièrement les rumeurs mais sans connaître pour l’instant de concrétisation pour des raisons à la fois logistiques et surtout financières.
 
Quoi qu’il en soit, malgré sa notoriété planétaire et sa grande différence de niveau, la NHL a toujours entretenu au fil des ans des liens confraternels et bienveillants avec le hockey sur glace français. Ce circuit professionnel très concurrentiel n’a jamais fait preuve de condescendance envers la France puisque depuis 1991, il a accepté d’accueillir au total sept joueurs représentant notre pays : Philippe Bozon, Cristobal Huet, Stéphane Da Costa, Antoine Roussel, Pierre Edouard Bellemare, Yohann Auvitu et Alexandre Texier.
De plus, le célèbre gardien de but Cristobal Huet est devenu une véritable star outre-Atlantique, surtout lors de son séjour inoubliable à Montréal où il fut le premier joueur français de l'histoire à participer au match All-Stars de la NHL avant de réussir l’exploit de remporter la Coupe Stanley avec les Blackhawks de Chicago en 2010.
 
Nouvelle preuve de l’intérêt que porte la NHL pour le hockey français : quatre joueurs tricolores ont été draftés à ce jour par le circuit professionnel nord-américain : Yorick Treille par les Blackhawks de Chicago en 1999 (195e rang), Cristobal Huet par les Kings de Los Angeles en 2001 (214e rang), Timothé Bozon par les Canadiens de Montréal en 2012 (64e rang) et Alexandre Texier par les Blue Jackets de Columbus en 2017 (45e rang). Les recruteurs de la NHL gardent donc toujours un œil attentif sur nos meilleurs joueurs.
 
Il est donc bien loin le temps où nos jeunes compatriotes étaient traités avec un certain mépris de « maudits français » lorsqu’ils venaient tenter leur chance dans l’impitoyable circuit junior majeur canadien ! Pierre Pousse, Philippe Bozon, Christophe Ville, François Dusseau et Benoît Nicoud, qui jouèrent avec les Castors de Saint-Jean en 1983 et 1984, peuvent en témoigner ! Sans oublier Christian Pouget qui tenta également sa chance aux Draveurs de Trois-Rivières et Jean-Philippe Lemoine avec les Chevaliers de Longueuil. Pour ces anciens espoirs tricolores ce ne fut pas toujours une partie de plaisir de rivaliser avec nos cousins canadiens…
 
Heureusement les temps ont changé. Désormais, nos hockeyeurs sont pris beaucoup plus au sérieux et la présence de joueurs français dans la NHL, même si elle reste très modeste comparativement aux autres pays européens (trois actuellement), ne fait plus l’effet d’une « curiosité » comme ce fut le cas lorsque Philippe Bozon devint un pionnier en portant le maillot des Blues de Saint-Louis de 1991 à 1995. Pour l’anecdote, l’ancien international puis coach de l’équipe de France Patrick Francheterre aurait pu être le précurseur dès le mois d’août 1972, puisqu’il participa au camp d’entraînement des Nordiques de Québec dans la NHL, mais il fut transféré dans le club réserve des Nordiques du Maine sans avoir pu entrer dans le célèbre circuit professionnel

 


Depuis plus de quarante ans Tristan Alric a été l’acteur et le témoin privilégié de l’évolution du hockey sur glace en France. D’abord comme joueur puis comme arbitre. Ensuite, en devenant le journaliste spécialiste du hockey sur glace dans le quotidien sportif L’Equipe pendant plus de vingt ans. Auteur de nombreux livres et d’une récente encyclopédie qui font référence, Tristan Alric a marqué également l’histoire du hockey français en étant le créateur de la Coupe Magnus et des divers trophées individuels. Avec un tel parcours, il est donc bien placé pour avoir une analyse pertinente sur notre sport favori. Le site Hockey Hebdo est donc heureux de lui permettre de s’exprimer régulièrement dans cette rubrique.
 
 
 
 
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